Dans ce bouquet de souvenirs publié aux éditions Abacus, Huguette Desrochers-Miron décrit son enfance, son adolescence et sa vie d’adulte. Elle relate les misères d’une famille québécoise ayant vécu à l’époque de la Grande Noirceur. Cette native de Saint-Henri brosse le portrait du quartier de son enfance où régnait une extrême pauvreté. Au fil des pages, c’est également l’histoire du Québec qu’elle nous raconte.
Grande lectrice, l’auteure a toujours aimé les mots. «J’ai participé à des ateliers en littérature, explique-t-elle. J’écrivais de petits articles, rien de plus.» Elle couchait sur papier des textes d’opinion sur des sujets d’actualité destinés aux journaux.
C’est à l’été 2007, alors qu’elle demeure à Gatineau, que Huguette Desrochers-Miron décide de s’inscrire aux ateliers J’écris ma vie, donnés dans un centre pour aînés francophone situé à Ottawa. Écrire sa vie. Remonter le temps. Des ateliers qui n’avaient rien d’innocents. «C’était un test pour faire travailler la mémoire», indique l’auteure, qui n’a pas eu à faire de gros efforts. Les événements passés, même les plus reculés, n’étaient pas très loin de la surface. «C’est comme si c’était hier, dit-elle. Les souvenirs sont encore très, très précis.»
Une image lointaine surgissait, «l’animatrice nous disait: écrivez ce que vous ressentiez dans votre cœur à ce moment», raconte Huguette Desrochers-Miron. Les phrases sortent de la plume avec aisance. «J’en avais écris un bon bout sans trop me forcer», dit-elle, quand un projet plus ambitieux s’est profilé. «Le but était de laisser ce texte à mes enfants», souligne l’auteure. Mais Éliane Morand, instigatrice des ateliers, et Estelle Daigle, linguiste, l’ont poussée à aller plus loin. «Elles me disaient: il ne faut pas laissez ça dans le fond d’un tiroir.» Il fallait publier ce récit.
Huguette Desrochers-Miron a mis quatre mois pour écrire le premier jet. «Et ça m’a pris un an à le peaufiner.»
Des gens chaleureux
L’auteure a résidé dans Saint-Henri jusqu’au début de l’adolescence, vers l’âge de treize, quatorze ans. Un quartier qu’elle n’a pas oublié. Celle qui habite aujourd’hui dans Rosemont y revient deux ou trois fois par année. «C’est resté tel quel, constate-t-elle. C’est vieux, c’est délabré, ça manque de couleur. C’est aussi déprimant que quand j’étais jeune.»
Mais si elle a le jugement sévère quant à l’apparence physique du quartier, Huguette Desrochers-Miron n’a que de bons mots pour ses résidants. Son grand plaisir: s’offrir une promenade au parc Sir Georges-Étienne Cartier et discuter avec les passants. «C’est le bonheur total», dit-elle. «Les gens sont chaleureux, à Saint-Henri. Tu es assise au restaurant et ils te font la conversation. Ils te jasent ça comme si tu étais leur belle-sœur. Ç’a toujours été comme ça. Les gens s’entraident». «Mon cœur est resté à Saint-Henri», avoue Huguette Desrochers-Miron.